Comment cultiver
Mode de culture des plantes carnivores:
Origine:
Les plantes carnivores, poussant généralement dans des milieux très acides et pauvres en éléments nutritifs, ont adapté au fil des années plusieurs techniques pour leur survie..
En effet, pour compléter leur nourriture, insuffisante au niveau du sol, elles ont développé des systèmes de pièges se trouvant au niveau des feuilles, pour capturer les insectes et assimiler les éléments nutritifs, tels que l'azote et autres qu'ils contiennent.
Cependant, les insectes ont une autre utilité aux plantes carnivores. En effet, le but n'est pas seulement la nutrition mais aussi, comme toute autre plante, la fécondation permettant la reproduction.
C'est pourquoi, les fleurs sont généralement plus hautes que les feuilles ou alors poussent à une autre période que celle-ci; le but étant que les insectes pollinisateurs soit épargnés..
C'est pour cela qu'aucune fleur n'est carnivore.
Généralités:
Pendant de longues années, un débat a existé pour savoir si on devait appeler ces plantes: plantes carnivores ou plantes insectivores, mais hormis les insectes généralement capturés, il est vrai, d'autres animaux viennent à être piégés aussi, tels que:
araignées, petits batraciens, petits oiseaux, reptiles, mollusques, rongeurs, etc..
Ex: la plus grosse capture découverte à ce jour est de 2 rats trouvés dans une urne du Nepenthes rajah situé dans son milieu naturel sur l'ile de Bornéo.
On trouve chez les plantes carnivores des espèces annuelles, bisannuelles mais la plupart sont vivaces. On trouve aussi des espèces terrestres et aquatiques.
Important: ne jamais nourrir les plantes soit même, et ne pas acheter ces plantes pour se débarrasser des insectes que l'on peut avoir chez soi car si elles en capturent certaines, elles en attireront beaucoup d'autres car elles produisent des odeurs ou des couleurs pour en attirer le maximum!
Types de pièges:
On retrouve chez les plantes carnivores plusieurs types de pièges:
Les pièges actifs :
-Les pièges à mâchoires : (Dionée, Aldrovanda)
Le plus représentatif est celui de la Dionée fonctionnant comme un piège à loup; les 6 (parfois 7) poils sensitifs situés au cœur de la feuille déclenchent le piège, il suffit pour cela que 2 poils différents soit touchés ou alors que le même poil soit touché 2 fois.
Si la fermeture est déclenchée par un objet non alimentaire, la feuille se réouvrira en 2/3 jours, dans le cas contraire, si les cellules détectent des protéines animales, elles déclenchent des enzymes digestives et la proie sera digérée en 2/3 semaines selon la taille de la capture..
La feuille peut effectuer 3 à 4 fermetures et la feuille mourra laissant place à une nouvelle feuille, d'où l'intérêt de ne pas les toucher soit même, car elle risque de s'épuiser et mourir rapidement..
-Les pièges à aspiration : (Utriculaire)
Les Utriculaires comportent des petites vésicules renflées qui constituent les pièges (2 à 5 mm). L'un des poils sensibles est heurté par un petit animal aquatique ; les valves s'ouvrent et aspirent l'eau et l'animal. L'animal est lentement digéré, tandis que l'eau s'évacue vers l'extérieur par osmose à travers les parois.
-Les pièges collants à léger mouvement : (Drosera, Pinguicula)
La feuille porte des petits poils avec à son extrémité des gouttelettes multicolores gluantes.
L'insecte est attiré par la brillance de celles-ci et s'englue. Les petits poils se replient très lentement et la digestion commence.
Pour les Pinguicula (grassette) 2 types de glandes existent :
Les plus grandes (visibles) collent et maintiennent les insectes, et les petites (invisibles à l'œil nu) tapissent la surface de la feuille et digèrent l'animal.
Les bords de la feuille se replient et permettent ainsi de retenir les liquides digestifs.
Les pièges passifs :
-Les pièges collants sans mouvement : (Drosophyllum, Byblis)
Les poils sont et fonctionnent comme ceux des Drosera mais ne créent pas de mouvement lors de la capture des insectes.
-Les pièges cornets : (Sarracenia, Darlingtonia, Nepenthes, Cephalotus, Heliamphora)
Les feuilles sont creusées, en forme de cornet, une fois l'insecte tombé dans l'urne. Il lui est impossible de remonter à la surface..
Certaines urnes, comme celle du Nepenthes ou du Cephalotus, produisent un liquide digestif permettant la noyade et la digestion de la proie.
D'autres comme Sarracenia purpurea ou les Heliamphora retiennent l'eau de pluie pour que l'insecte tombé dans l'urne se noie et soit digéré.
Enfin, pour les autres Sarracenia, la plante est formée en 4 zones:
zone 1: opercule mobile, couleurs et nectars pour attirer l'insecte
zone 2: zone de glissade rendant la remontée de l'insecte impossible
zone 3: glissade et début des glandes digestives
zone 4: glandes digestives
Les urnes comptent souvent, au niveau des zones 1 et 2, des poils dirigés vers le bas, empêchant la remontée des insectes.
-Les pièges en nasse: (Genlisea)
Le Genlisea possède une espèce de tube en spirale terminé par une partie renflée qui agit comme une nasse..
Types de culture:
Pour élever ses plantes carnivores, l'optimal est de se rapprocher le plus possible du milieu naturel de la plante que l'on possède.
Pour cela, plusieurs options existent:
serre:
Installation idéale car on peut y faire une serre froide, tempérée ou tropicale selon le type de plante.
L'idéal étant une structure en aluminium et des plaques en polycarbonate ou en verre
La serre doit bien être isolée des fuites d'air si un chauffage y est placé pour l'hiver.
Une autre aération type au-vent est nécessaire pour les chaleurs d'été permettant une circulation d'air pour éviter les surchauffes.
tourbière:
La création d'une tourbière artificielle est idéale pour la culture des Sarracenia, ainsi que de toutes les plantes carnivores robustes et résistantes au gel..
L'emplacement devrait se faire plein Sud et le plus possible protégé du vent pour éviter aux grandes plantes un risque de cassure.
La tourbière devra être profonde et laisser place au fond à une réserve en eau avec pour ceci une couche de gravât non-calcaire type pouzzolane ou argile expansé..
Attention cependant à la quantité d' eau que nécessite une tourbière. En effet il faudra sûrement trouver un moyen de récupérer l'eau de pluie par l'intermédiaire d'une cuve..
terrarium:
Le terrarium est idéal lui pour la culture des plantes tropicales ou si l'on habite en appartement.
La reconversion d'un aquarium ou un vivarium est idéale pour créer son terrarium,il faut essayer cependant de créer de l'humidité dont les plantes ont besoin à l'aide d'un brumisateur..
Si le terrarium est placé dans un coin ombragé de la maison, il faudra un complément de lumière à l'aide d'un tube fluorescent.
Répartition géographique:
Les plantes carnivores sont réparties sur tous les continents:
-les Sarracéniacées et la Dionaea mascipula ne sont localisées qu'en Amérique du Nord
-les Drosera et les Utriculaires sont réparties sur tout le globe
-les Pinguicula: beaucoup sont localisées au Mexique mais aussi dans tout l'hémisphère Nord
-les Népenthès sont elles, généralement localisées en Asie
En France, on peut trouver:
- 4 espèces de Drosera:
D. rotundifolia, D. rotundifolia f. corsica, D. intermedia et D. anglica
- 7 espèces de Pinguicula:
Pinguicula alpina, P. corsica, P. grandiflora, P. leptoceras, P. longifolia, P. lusitanica et P. vulgaris
- 6 espèces d'Utriculaire:
Utricularia bremii, U. intermedia, U neglecta, U. minor, U. ochroleuca, U. vulgaris
Aujourd'hui, on compte:
8 familles, 19 genres pour + de 500 espèces de plantes carnivores.
Le nombre pouvant augmenter car de nouvelles plantes sont trouvées dans des régions reculées du monde et très peu fréquentées.
Substrat:
Le substrat le plus utilisé est la tourbe blonde que l'on trouve dans les tourbières, où vivent la plupart des plantes carnivores. La tourbe blonde est le résultat de la décomposition de la sphaigne (ou sphagnum), mousses, arbres et roseaux; gorgés d'eau.
Le PH est fortement acide (compris entre 4 et 5) et le rapport C/N (carbone/azote) est de l'ordre de 40; l'azote est si peu élevé ; c'est pourquoi elles prélèvent l'azote contenu dans les insectes.
La tourbe blonde ne suffit pas à l'élaboration du substrat ; en effet il faut y apporter différents matériaux complémentaires en fonction du type de plantes pour alléger le sol.
Pour un mélange de culture 'standard' on fait un mélange de 70% de tourbe blonde avec 30% de sable de quartz (sable non-calcaire)
On peut aussi compliquer et améliorer le mélange en remplaçant 10% de sable de quartz par 10% de perlite ou 10% de vermiculite.
On peut aussi pour les Héliamphora, par exemple, faire un mélange de 100% de sphaigne vivante ou y incorporer 10% à 20% de perlite.
Pour les plantes, plus difficiles de culture tels que les Nepenthes, des mélanges plus rigoureux existent ! L'essentiel étant que le substrat soit bien aéré.
Mélange possible avec écorces, fibre de coco, polystyrène, pouzzolane, argile expansé ou laine de roche.
Le rempotage de plantes carnivores s'effectue tous les 4/5 ans pour les pots et 10/15 ans pour les grands bacs et tourbières.
Contenant/pot:
Le choix du pot est très important dans la culture des plantes carnivores!!
Le pot plastique sera préféré au pot en terre cuite car il permet de garder l'humidité au niveau du substrat et il ne retient pas les sels minéraux qui peuvent intoxiquer la plante.
Un grand pot profond est idéal pour les plantes ; en effet, elles ont, pour la plupart, un grand système racinaire et ont besoin de place pour leur croissance.
La taille de la plante ne fait pas la taille du pot. A l'achat. pensez à rempoter votre plante dans un pot plus grand.
On peut choisir aussi l'option de les cultiver ensemble dans de grands bacs mais attention à mettre des plantes 'compatibles' entre elles, surtout au niveau de leurs exigences au niveau de l'exposition solaire, ou de l'arrosage..
Attention aussi au fait que la plante, dans un espace où elle se sent bien, peut devenir très grande et gêner ainsi par la suite ses voisines si celles-ci sont placées trop près.
Lumière:
La lumière est indispensable pour les plantes carnivores et peut, pour certaines variétés, leur donner de très belles couleurs rouges comme pour les Sarracenia purpurea, Sarracenia psittacina mais aussi les Dionaea mascipula.
En général:
plein soleil: Sarracenia, Dionaea, Drosera, Heliamphora, Utriculaire
mi-ombre: Nepenthes, Cephalotus, Pinguicula
Voir les fiches de culture associées aux plantes
Attention: ne jamais placer une plante derrière une fenêtre de maison trop près de la vitre au risque de la brûler, laisser un écart de 10/15 cm minimum
Température:
Pour la température, elle sera fonction de la plante ou du type de plante, à savoir:
T° <0 l'hiver: Sarracenia,Darlingtonia, les Dionaea et les Drosera et Pinguicula à hibernacle
T° >1 l'hiver: Drosera tempérée, Pinguicula, Heliamphora, Nepenthes d'altitude
T° >15 à 25 toute l'année: Nepenthes de plaine, quelques Drosera (celles du Queensland en Australie notamment)
On note que pour la culture des Heliamphora, une différence entre les températures diurnes et les températures nocturnes doit être rendue obligatoire; si un système de ventilation ou de refroidissement n'est pas installé, il faudra créer une ambiance très humide.
A noter aussi que certaines plantes comme les Dionaea, Sarracenia, Darlingtonia et certaines Drosera, exigent un passage au froid 'obligatoire' l'hiver sous peine de voir mourir la plante prématurément.
Arrosage:
Point essentiel dans la culture des plantes carnivores.
Ce sont des plantes de marais donc qui adorent l'eau.
Les types d'eaux utilisées:
L'eau du robinet est interdite, trop calcaire et trop minéralisée pour les plantes carnivores.
Une eau comme celle-ci provoquera une mort certaine de la plante!!
On préfèrera 3 sortes d'eau:
- l'eau de pluie: c' est l' idéal si on peut la récupérer et la stocker
- l'eau déminéralisée: on la trouve dans le commerce (pour les fers à repasser par exemple)
- l'eau osmosée: pour aquarium, l'inconvénient étant son prix très élevé!!
L'arrosage se fait uniquement par subirrigation (à l'aide d'une soucoupe par exemple, l'eau remonte par capillarité). En effet, il est totalement interdit d'arroser une plante carnivore 'par le dessus'.
Au printemps, en été et au début de l'automne: le pot devra baigner dans 3 à 5 cm d'eau.
A la fin de l'automne et en hiver: réduire l'arrosage, les pots ne devront plus tremper dans l'eau mais on régulera l'arrosage de façon à tenir le substrat humide, sans le dessécher.
Attention: il y a des exceptions pour l'arrosage, pour la culture des Drosophyllum et des Drosera tubéreux où l'arrosage devra être réduit l'été (quasiment nul) attention quand même à ne pas laisser le substrat se dessécher totalement sous peine de mort de la plante..
Les Pinguicula sont les seules plantes carnivores à tolérer l'eau du robinet.
Humidité:
L'humidité est l'une des clefs du succès de la culture des plantes carnivores car, étant très présente dans les marais, il est nécessaire de la reproduire en culture.
Le taux d'humidité optimal sera le taux d'humidité maximal possible selon les paramètres tels que le soleil, la température, l'aération, etc..
Plusieurs possibilités pour avoir de l'humidité:
- utiliser une soucoupe large
- utiliser de grands bacs
- utiliser un brumisateur
La vaporisation sur les plantes n'est pas recommandée sauf sur les Nepenthes.
Engrais:
Les engrais sont à proscrire totalement de la culture des plantes carnivores. L'engrais est remplacé par les insectes qu'elles capturent et assimilent.
Exception pour les Nepenthès si les urnes ne poussent pas, on pourra apporter un engrais orchidées dilué au dixième.
Attention à ne pas nourrir les plantes soit même!!
Multiplication:
Voici les différentes méthodes pour multiplier vos plantes:
le semis:
Semez vos graines à la surface du mélange de culture directement ou recouvrez d'une fine couche de tourbe.
Attention, cependant toutes les plantes ne sont pas auto-fécondes et la fécondation par un insecte ou par 'la main de l'homme' sera nécessaire.
Certaines graines comme celles du Drosophyllum ou des Sarracenia ont besoin d'un passage à l'eau afin de ramollir leur enveloppe.
Les graines peuvent se conserver au réfrigérateur pendant une période de deux ans maxi
(idéal pour les Drosera et Pinguicula)
le bouturage:
Pensez à prélever au printemps une feuille saine et posez la sur la tourbe en la recouvrant légèrement ; la feuille devra rester en contact permanent avec la terre humide.
Au besoin trempez le bout de la feuille dans de l'hormone de bouturage pour optimiser vos chances de réussite.
(idéale pour les Nepenthes, Cephalotus, Drosera et cultivars de Dionaea)
le marcottage:
Incisez la tige et mettez de l'hormone de reprise, puis placez dans un sac plastique troué et transparent, de la sphaigne hachée humide.
Dès l'apparition des racines, coupez la tige et replantez la..
(idéal pour Nepenthes)
la division de touffe:
Elle consiste à diviser un pied mère assez conséquent afin d'obtenir plusieurs pieds de taille déjà adulte ; le but étant de séparer la plante avec un système racinaire existant.
(idéal pour les Sarracenia, Heliamphora et Dionaea)
les stolons:
A l'extrémité des stolons se forment des plantes qui peuvent être coupées puis replantées
cas pour Darlingtonia , Drosera prolifera et certaines Utriculaires.
les gemmes:
Les gemmes se forment en hiver et se détachent très facilement du cœur de la plante.
Ils doivent être détachés de la plante et reposés sur la surface du mélange.
(uniquement pour les Drosera pygmées)
La culture 'in vitro'
Utilisable pour les professionnels, cette méthode permet, à partir d'une seule espèce, d'obtenir une multitude de boutures identiques.
(idéal pour les espèces difficiles)
Maladies/ parasites:
De bonnes conditions de culture, bien respectées, éviteront les maladies; des visites régulières et un bon entretien vous assureront des plantes en bonne santé..
Dès l'apparition de parasites ou de premiers symptômes de maladie, réagissez au plus vite avant la prolifération à d'autres plantes..
- croissance ralentie: pot trop petit, manque de lumière
- feuilles qui jaunissent : trop de lumière, peu d'humidité
- bord des feuilles qui noircit : manque lumière et d' aération
- bas de la plante meurt : substrat trop tassé, trop d'eau
- moisissures : manque de ventilation, trop d'humidité
- malformations : présence de pucerons
- trous dans les plantes : présence de limaces ou de chenilles
Certaines plantes peuvent être déformées sans qu'il y ait une présence de pucerons, il s'agit peut être d'un virus et dans ce cas, aucun traitement n'est vraiment possible..
Taille:
La taille n'est pas obligatoire chez les plantes carnivores mais elle est conseillée sur certaines variétés:
chez les Sarracenia, coupez au printemps les urnes de la saison précédente à 5 cm du sol pour éviter un pourrissement de celles-ci
chez les Dionaea, coupez les feuilles noires pour éviter les maladies
chez les Nepenthes, coupez les urnes sèches
chez les Drosera, coupez les feuilles sèches qui se trouvent généralement en bas de la plante.
Protection:
Les plantes carnivores sont interdites à la cueillette ; elles sont protégées par la loi!!
L'extension des cultures et de l'urbanisation détruit l'habitat et le fragmente. Les zones humides, marécageuses sont souvent asséchées. La fragmentation de l'habitat compromet la diversité génétique des populations.
Respecter la nature c'est aussi se respecter soi-même.
Où les trouver?
On peut trouver des plantes carnivores dans certains commerces comme les jardineries ou les foires aux plantes, par des producteurs spécialisés.
Où les découvrir?
On peut découvrir les plantes carnivores dans leur milieu naturel comme les tourbières (tourbière de Frasnes dans le Jura) mais aussi dans certains jardins botaniques (jardin botanique de Lyon).
Il existe aussi des associations (comme Dionée) qui permettent aux adhérents des visites sur des sites naturels, mais aussi des rencontres entre passionnés, des échanges, etc..
Référence:
livre:
Gérard BLONDEAU: PLANTES CARNIVORES
revues DIONÉE
internet:
http://www.forumcarnivore.org/
http://plantes-carnivores.fr.st/
http://plantes-carnivores.com/
merci de votre attention...
par Laurent MOULIN
www.carni69.e-monsite.com